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Ailleurs dans le monde: Une entrevue avec Krzysztof Grzesik, REV, président de TEGoVA et vice-président de la Polish Federation of Valuers’ Associations

Évaluation immobilière au Canada

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2017 – Volume 61 – Tome 2
Ailleurs dans le monde: Une entrevue avec Krzysztof Grzesik, REV, président de TEGoVA et vice-président de la Polish Federation of Valuers’ Associations
Krzysztof Grzesik, REV

Ailleurs dans le monde: Une entrevue avec Krzysztof Grzesik, REV, président de TEGoVA et vice-président de la Polish Federation of Valuers’ Associations

Krzysztof Grzesik, REV est le directeur général de Polish Properties, une firme d’évaluation spécialisée à Varsovie, en Pologne, qui emploie une équipe de 15 évaluateurs qualifiés, analystes et stagiaires du marché immobilier. Polish Properties évalue des biens immobiliers principalement commerciaux (bureaux, centres d’achat, hôtels et entrepôts) pour toutes fins à travers la Pologne.

Après avoir obtenu son diplôme en gestion immobilière à l’Université de Reading, en 1975, Krzysztof a débuté comme évaluateur immobilier à l’Office d’évaluation du gouvernement du Royaume-Uni, puis en tant que partenaire de Kinney & Green, évaluateurs reconnus dans la Cité de Londres. En 1991, il a établi la branche des services immobiliers de Price Waterhouse en Pologne, il a aussi fait du travail de consultation auprès d’agences et de firmes immobilières en République tchèque, en Hongrie et en Russie. En 1997, il s’est joint à Healey & Baker Poland (Cushman & Wakefield), comme partenaire, responsable de l’agence d’investissement et, en 2004, il a créé Polish Properties Sp. z o.o.

Quel poste et quelles fonctions occupez-vous avec l’European Group of Valuers’ Associations (TEGoVA) ?

Je suis présentement président du Conseil d’administration de TEGoVA, tout en représentant et en servant à titre de vice-président de l’un de ses membres, la Polish Federation of Valuers’ Associations (PFVA).

TEGoVA réunit 65 associations nationales d’évaluation de 35 pays, représentant quelque 70 000 évaluateurs qualifiés à travers l’Europe. L’organisation accueille également des membres observateurs de l’extérieur de l’Europe, y compris l’Institut canadien des évaluateurs (ICE) et l’Appraisal Institute (É.-U.).

Cette année marque le 40e anniversaire de TEGoVA. Depuis quatre décennies, elle est la voix de la profession d’évaluateur et l’organisme de normalisation en Europe, publiant et mettant à jour périodiquement son produit-phare, le Blue Book des normes d’évaluation européennes. Dans le but d’améliorer les normes de la pratique d’évaluation et la transparence des marchés, le fait de diriger les évaluateurs de toute l’Europe a contribué à l’impressionnant bloc de connaissances et au rôle de guide du Livre bleu. En ma qualité de président de TEGoVA, mon travail consiste principalement à rehausser le profil et le statut de la profession d’évaluateur en Europe, en faisant la promotion des normes d’évaluation européennes ainsi que les désignations professionnelles Recognized European Valuer (REV) et TEGoVA Residential Valuer (TRV).

Quels bénéfices tangibles l’Accord commercial Canada-Union européenne (ACCUE) rapportera-t-il pour les services professionnels rendus par les évaluateurs ?

Durant les négociations de l’ACCUE, le gouvernement canadien a réussi à persuader l’Union européenne (UE) d’utiliser des ‹ listes de services exclus › plutôt que les ‹ listes de services admis › plus classiques. Dans un système de services admis, les seuls services libéralisés sont ceux qui sont indiqués sur la liste. Mais, dans un système de services exclus, tous les services sont libéralisés, sauf ceux qui apparaissent sur la liste.

Comme les services d’évaluation ne figurent pas sur la liste, l’UE est l’huître de l’ICE, et vice versa. Cependant, il est toujours possible qu’un gouvernement national européen avance que les AACI et les CRA ne sont pas à la hauteur de ses qualifications nationales en matière d’évaluation, que les Canadiens devraient quand même obtenir. L’ACCUE n’offre pas aux évaluateurs canadiens les moyens de combattre la discrimination arbitraire que peuvent employer les membres de l’UE. Toutefois, l’ACCUE prévoit en réalité la reconnaissance mutuelle des qualifications définies par l’ICE et TEGoVA. Un tel accord aurait seulement besoin d’être sanctionné par le Comité conjoint de l’ACCUE. Entre-temps, même si le présent Protocole d’entente (PE) de l’ICE/TEGoVA ne peut servir adéquatement comme base unique pour l’accord de qualification d’évaluateur de l’ACCUE, il pourrait bien être suffisant pour persuader une autorité nationale de ne pas s’opposer à un AACI ou un CRA qui souhaite rendre des services dans l’État membre de l’UE en question.

À travers TEGoVA, vous avez travaillé étroitement avec l’ICE pour examiner les normes mutuelles et pour élaborer une entente de réciprocité reconnaissant les désignations de chacun comme étalons de référence. Comment cette relation s’est-elle développée et qu’est-ce qu’elle signifie pour la profession en Europe ?

La relation est historique, à la lumière des vastes enjeux et possibilités décrits dans la réponse à la question précédente. Mais, en ce qui touche l’objectif initial préalable à l’ACCUE qui consiste, pour notre part, à permettre aux évaluateurs européens de démontrer aux investisseurs immobiliers canadiens qui cherchent des évaluateurs professionnels du niveau canadien que les REV et les TRV sont des désignations équivalentes aux désignations correspondantes de l’ICE, il est encore trop tôt pour dire combien de contrats de service nous avons obtenus grâce à cela, car nous n’avons pas systématiquement interrogé nos membres. Ce qui est indéniable, c’est la force continue et croissante des investissements en Europe par des compagnies et des fonds immobiliers canadiens, indiquant qu’il existe certainement du potentiel dans ce domaine.

Qu’est-ce qui doit arriver pour que la profession continue d’évoluer de façon positive ?

Les normes d’évaluation et les critères de qualification des évaluateurs doivent évoluer en suivant les rapides changements qui surviennent dans l’environnement réglementaire, avec une emphase particulière sur le comportement éthique de nos professionnels.

Nous devons aussi contribuer à une plus grande transparence des marchés, à l’échelle mondiale, et je crois que nous n’y arriverons pas si les évaluateurs analysent les transactions marchandes de façons disparates et s’ils appliquent leurs propres versions des méthodes reconnues (comparaison, revenu et coût). Par exemple, même si l’on applique généralement la méthode de la valeur actualisée des flux de trésorerie pour évaluer des biens immobiliers commerciaux, on ne le fait pas systématiquement.

Depuis plusieurs années, l’accent, certainement en Europe, a été placé sur les normes d’évaluation plutôt que sur les méthodes, ces dernières devenant principalement l’apanage des universitaires. Pendant des décennies, les professionnels ont évité de chercher des moyens d’harmoniser la pratique de l’évaluation. Cette situation ne peut plus durer, maintenant que les clients remettent en question la diversité des méthodes appliquées, même au sein d’un champ de compétence donné. En effet, beaucoup de clients pensent erronément que les normes d’évaluation s’articulent autour de la méthodologie, alors qu’il n’en est rien.

Bien qu’elle n’empiète pas sur les activités académiques, je crois que la profession à travers le monde devrait formuler un point de vue ‹ collectif › des professionnels sur les enjeux méthodologiques et rédiger des lignes directrices conviviales. Pour sa part, TEGoVA a mis sur pied cette année l’European Valuation Practice and Methodology Board (EVPMB) à cette fin précise. Pour commencer, l’EVPMB examinera, actualisera et développera encore plus les positions de TEGoVA sur les méthodes d’évaluation. Il répondra aussi aux enjeux méthodologiques à mesure qu’ils apparaissent, particulièrement l’évaluation du concept européen de la valeur des prêts hypothécaires et l’exactitude des modèles d’évaluation automatisés. L’EVPMB facilitera les discussions européennes et, souhaitons-le, transatlantiques sur les enjeux méthodologiques.

Comment la profession d’évaluateur s’est-elle développée dans votre propre marché en Pologne ?

Une profession d’évaluateur véritablement moderne axée sur le marché a commencé à prendre forme en Pologne il y a seulement 25 ans, après la chute du communisme. Parce que le gouvernement polonais devait s’assurer à l’époque que les actifs de l’État ne seraient pas vendus trop bon marché, presque immédiatement le Parlement de la Pologne a adopté une loi sur l’octroi de licence obligatoire pour les évaluateurs. Pour obtenir cette licence, un stagiaire doit détenir un diplôme universitaire, obtenir un certificat d’études supérieures en évaluation, franchir une période de formation structurée et réussir un examen national pour les évaluateurs. Depuis l’introduction des licences en 1992, quelque 7000 stagiaires ont obtenu leur licence, même si le nombre d’évaluateurs qui pratiquent aujourd’hui est d’environ 4000. Alors que plusieurs aspects de la pratique d’évaluation sont contrôlés par statut, la PFVA a un rôle majeur à jouer dans la formation des évaluateurs, dans la présentation d’événements de perfectionnement professionnel continu (PPC) et dans l’élaboration d’un ‹ Livre vert › sur les normes d’évaluation conformes aux normes d’évaluation européennes.

Comme dans le reste de l’Europe, la méthodologie d’évaluation est un sujet brûlant de discussion et les évaluateurs polonais jouent un rôle actif pour alimenter les discussions européennes.