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Expropriation partielle : le residu

Évaluation immobilière au Canada

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2014 – Volume 58 – Tome 1
Expropriation partielle : le residu
Tony Sevelka

Par Tony Sevelka, AACI, P.App

RÉSUMÉ

Ce document se propose d’informer les évaluateurs et les professionnels de l’immobilier au sujet des difficultés que présentent l’évaluation de biens expropriés et les procédures nécessaires pour étayer les opinions quant à la valeur d’une expropriation partielle. Le propriétaire d’un bien exproprié a droit à la valeur marchande du terrain qui lui est enlevé plus toute diminution de valeur subie par le résidu. Dépendamment de la nature et de la portée de l’expropriation, y compris des travaux publics, la valeur du terrain résiduel peut être affectée. L’ampleur des répercussions sur la valeur est fonction de la détermination à savoir si le terrain qui n’est pas exproprié est un résidu viable ou non viable. Après une expropriation partielle, le résidu constitue un bien immobilier entièrement nouveau qui exige la préparation d’une évaluation distincte autonome et indépendante de l’évaluation du bien original.

i Travaux publics définis comme « structures, chemins, digues, ou bureaux de poste, payés par le gouvernement à des fins d’utilisation publique », http://dictionary.reference.com/browse/public+works.

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Les expropriations exigent fréquemment l’exécution de travaux publics. Les évaluations se doivent d’aider à quantifier la rémunération à laquelle un propriétaire foncier a droit. Dans l’expropriation d’un bien, une expropriation partielle laisse toujours derrière elle un bien non exproprié. Le terrain non acquis peut posséder divers degrés d’utilité, dépendamment de la nature et des caractéristiques du terrain, de la présence et du type de toutes les améliorations et de la relation spatiale du terrain avec le bien-fonds attenant, y compris la partie expropriée. Le terrain qui n’est pas acquis lors de l’expropriation d’un bien est ce qu’on appelle le résidu. Une expropriation partielle qui cause une disjonction aura toujours plus d’un résidu.

Tout résidu devrait être traité comme un nouveau bien-fonds exigeant une évaluation préparée indépendamment de l’évaluation avant l’expropriation. Les principes d’évaluation utilisés dans l’évaluation initiale devraient aussi être appliqués à l’évaluation du résidu, y compris l’identification de la plus grosse parcelle comme faisant partie de l’analyse de l’utilisation optimale du résidu. Toutefois, les deux évaluations doivent se conformer aux dispositions pertinentes de la loi sur l’expropriation en vigueur, faisant abstraction du projet quand il y a lieu de le faire.

On définit un résidu comme « la portion d’une plus grosse parcelle demeurant la propriété du propriétaire foncier après une expropriation partielle. » Un autre terme proche est celui de restant, qu’on définit comme « un résidu ayant une utilité ou valeur économique négligeable à cause de sa taille, sa forme, [son emplacement] ou d’autres caractéristiques préjudiciables; aussi appelé résidu non rentable ou restant non rentable. »

Il existe deux types de résidus en expropriation foncière. Dans le présent document, ils sont désignés comme résidus viables et résidus non viables. Un résidu viable est un résidu vendable comme entité autonome. Un résidu non viable est essentiellement l’équivalent d’un restant ou d’un résidu non rentable ou d’un restant non rentable, termes d’usage commun dans les juridictions aux É.-U.

Pour qu’un résidu ait une valeur, il doit posséder quatre facteurs économiques : (1) une demande (il doit être désiré; moins il y a d’acheteurs, plus la demande est faible); (2) une utilité (les acheteurs doivent pouvoir l’utiliser); (3) une rareté (il doit être relativement rare, parce qu’un excédent d’offre fait baisser le prix); (4) pouvoir d’achat (il doit y avoir une capacité financière d’acheter; une baisse du nombre d’acheteur fait baisser le prix).

Les évaluateurs sont appelés par les autorités expropriantes et par les propriétaires concernés à préparer des évaluations en conformité du cadre législatif. Le rôle de l’évaluateur consiste à faire une enquête afin de dégager l’ensemble des facteurs économiques pertinents et d’élaborer des opinions bien étayées sur la valeur à l’intérieur de ce cadre législatif. Ce travail exige une bonne compréhension des procédures d’évaluation s’appliquant uniquement à l’expropriation.

Valeur marchande

La valeur marchande étant le point de mire de la plupart des tâches d’évaluation, une définition économique et une définition juridique ont été élaborées. La définition économique de la valeur marchande que donne l’Appraisal Institute est : « Le prix le plus probable auquel l’intérêt foncier spécifié devrait se vendre sur un marché de concurrence après une période d’exposition raisonnable, à une date donnée, en espèces ou selon des termes équivalents, dans toutes les conditions requises pour l’obtention d’un prix de vente équitable, l’acheteur et le vendeur agissant avec prudence, en connaissance de cause, dans leur propre intérêt et sans contrainte. » Une évaluation préparée aux fins d’une expropriation exige une définition juridique de la valeur marchande extraite de la loi sur l’expropriation afférente. Par exemple, en Ontario, le paragraphe 14(1) de la Loi sur l’expropriation définit la valeur marchande comme : « La valeur marchande d’un bien-fonds exproprié correspond à la somme qu’il rapporterait vraisemblablement s’il était vendu sur le marché libre par un vendeur consentant à un acheteur consentant. »  .

Une opinion sur la valeur marchande d’un bien-fonds doit se fonder sur l’utilisation optimale. L’utilisation optimale est la question de fait fondamentale à laquelle on doit répondre avant qu’un évaluateur puisse offrir une opinion quant à la valeur marchande. Tous les aspects pertinents de l’analyse de l’utilisation optimale qui s’appliquent au bien-fonds exproprié doivent être examinés et suffisamment documentés pour appuyer l’opinion sur la valeur marchande.

L’évaluateur a pour premier objectif d’élaborer des opinions fondées sur des faits quant à la valeur marchande, mais la valeur marchande ne s’applique pas dans un marché bilatéral. On entend par marché bilatéral un marché dans lequel un seul vendeur est confronté par un seul acheteur. En pareille situation, la valeur d’un résidu non viable est affectée par l’interdépendance du résidu non viable et d’un bien-fonds attenant appartenant à un autre propriétaire, combiné pour former une seule plus grosse parcelle. Le transfert d’une propriété dans de telles conditions ne satisfait pas au test de la valeur marchande, ce test supposant un marché actif comptant plusieurs acheteurs et vendeurs et offrant un choix de bien-fonds disponibles.

La valeur marchande ne s’applique pas à un résidu non viable, parce que ce dernier n’a pas d’utilisation optimale indépendante. La valeur d’un résidu non viable se rattache plutôt à la valeur marchande d’une plus grosse parcelle par voie de « valeur contributive ». La valeur contributive se mesure en termes de montant que le résidu non viable ajoute à la valeur de la parcelle plus grosse ou de montant que l’absence du résidu non viable soustrait de la valeur de la parcelle plus grosse.

Effet préjudiciable

L’effet préjudiciable, parfois appelé dommages résiduels, représente la perte de valeur subie par un résidu lors de l’expropriation d’un bien-fonds. L’article 1 de la Loi sur l’expropriation de l’Ontario précise qu’un effet préjudiciable se produit :

(a) lorsqu’une autorité légalement compétente acquiert une partie du bien-fonds d’un propriétaire :

(i) d’une part, de la diminution de la valeur marchande de la partie restante du bien-fonds du propriétaire qui est causée par cette acquisition, par la construction d’ouvrages sur le bien-fonds, par l’utilisation des ouvrages qui s’y trouvent ou par toute combinaison de ces éléments,

(ii) d’autre part, des dommages personnels et commerciaux qui résultent de la construction ou de l’utilisation des ouvrages, ou de ces deux éléments à la fois, et dont l’autorité légalement compétente serait tenue responsable si cette construction ou cette utilisation n’étaient pas autorisées aux termes d’une loi.

Pour que soit accueillie la réclamation du propriétaire d’un bien-fonds en vertu de l’effet préjudiciable découlant d’une expropriation, il doit être démontré que l’expropriation partielle a provoqué un changement à la valeur du résidu. En général, les critères suivants doivent s’appliquer pour qu’un effet préjudiciable soit reconnu : (1) le résidu doit être « détenu avec » le terrain exproprié; (2) la perte de valeur potentielle du résidu doit être occasionnée par l’utilisation ou la construction des travaux publics prévus effectués par l’autorité expropriante sur le terrain exproprié; (3) la perte de valeur potentielle du résidu doit ne pas être trop éloignée; (4) la perte de valeur potentielle du résidu doit être permanente plutôt que temporaire. Tant que le terrain exproprié (la partie expropriée) fait partie d’un seul bien foncier et relié de façon tellement inextricable au résidu qu’il en diminue l’utilisation ou la qualité marchande courante ou potentielle, le propriétaire foncier a droit à une indemnisation du préjudice conséquent subi par la partie non expropriée.

Une valeur marchande après expropriation qui est moindre que la valeur marchande avant expropriation, mois la valeur contributive de la partie expropriée, suggère que le résidu a subi un préjudice (c.-à-d., a subi une perte de valeur disproportionnée). Cependant, l’effet préjudiciable doit être prouvé par des exercices d’évaluation indépendants, mutuellement exclusifs et objectifs qui ne sont pas biaisés par une présomption de dommages. Comme l’a indiqué la Commission dans Ammouri, en rejetant la position prise par l’un des évaluateurs : « Son approche dans cette affaire suppose un effet préjudiciable de fait auquel il a ensuite appliqué les constatations de son étude pour en arriver à une quantification. L’effet préjudiciable n’est pas une conséquence axiomatique d’une expropriation…. [Son] analyse dans cette affaire le laisse entendre. Il a mis la charrue devant les bœufs et la Commission juge que, ce faisant, il n’a pas démontré la présence d’un effet préjudiciable dans ces circonstances. »

D’innombrables facteurs juridiques, physiques et économiques peuvent influer sur la valeur marchande d’un résidu. Les facteurs et leur importance varient selon le type de propriété, son utilisation réelle ou potentielle et la présence d’améliorations. Les facteurs qui affectent des biens-fonds ruraux sont souvent différents de ceux qui affectent les bien-fonds urbains. Certains des facteurs potentiels qui peuvent avoir une incidence sur la valeur d’un résidu comprennent les restrictions de titre, servitudes, exposition, accessibilité, configuration, dimensions et taille du lot, topographie, drainage, production de cultures, baisse d’utilité des améliorations existantes, augmentation des coûts fixes, non-conformité aux dispositions de zonage et changement de l’utilisation optimale.

Le moment et la nature des travaux publics pour lesquels l’expropriation du bien-fonds est entreprise peut aussi avoir des répercussions sur la valeur du résidu à cause de la valeur temporaire de l’argent et selon que lesdits travaux publics limitent ou rehaussent l’utilité du résidu.

Résidus viables et non viables

Un résidu viable est une plus grosse parcelle autonome ayant une valeur marchande indépendante et une utilisation optimale. Cependant, si la partie expropriée a une plus grande valeur comme partie de l’ensemble de la propriété dans son utilisation optimale avant l’expropriation, le propriétaire foncier a droit à la valeur contributive de la partie expropriée et il n’y a pas d’effet préjudiciable.

Un résidu non viable n’a pas d’utilisation optimale indépendante et une qualité marchande limitée. À moins de pouvoir être raccordée à un bien-fonds adjacent comme partie d’une plus grosse parcelle pour laquelle une utilisation optimale peut être établie, un résidu non viable aura une valeur marchande nominale ou nulle. Seul un terrain d’un bien-fonds adjacent qui ne fait partie d’aucun autre terrain exproprié peut être considéré dans la définition d’une plus grosse parcelle.

Dans toutes les juridictions au Canada, aucune autorité expropriante ne peut forcer un propriétaire foncier à céder plus de terrain que ce qui est nécessaire pour réaliser la fin publique soutenant une expropriation. Par conséquent, quand une expropriation partielle résulte en un résidu non viable, une estimation séparée et indépendante de la valeur (c.-à-d., la valeur contributive) doit être faite du résidu non viable.

Coût de redressement

Dans certains cas, il peut être possible d’entreprendre un « coût de redressement » qui transformera un résidu non viable en un résidu viable. Par exemple, si le droit d’accès peut être rétabli pour un résidu enclavé, il peut s’avérer rentable de remédier à cette lacune. Ce remède n’est bénéfique que si le coût de redressement comme mesure d’indemnisation d’un effet préjudiciable ne dépasse pas la diminution de la valeur marchande subie par le résidu laissé sans remède (c.-à-d., sans droit d’accès). En plus du coût estimé pour remédier à la lacune, on devrait prendre en considération dans la détermination de la pertinence du coût de redressement : (1) si un acheteur du résidu pourrait obtenir toutes les approbations nécessaires pour appliquer le redressement; (2) si le redressement peut être effectué à un prix fixe; (3) si un acheteur s’attendrait à être indemnisé pour le risque et l’incitation à l’entrepreneuriat dans l’exécution du redressement; (4) si le redressement peut être accompli dans un délai raisonnable (c.-à-d., non distant). La considération dominante consiste à assurer que le redressement envisagé est à la fois pratique et justifié.

Application de la notion de plus grosse parcelle à un résidu non viable

Par exemple, on peut avoir trois propriétés adjacentes à un résidu enclavé non viable, une de chaque côté et une autre à l’arrière. Dépendamment de la taille et de l’utilité (utilisation) de chaque propriété adjacente et selon que ces propriétés font partie du même projet d’expropriation que le bien-fonds en objet, les analyses visant à identifier une plus grosse parcelle peuvent être extrêmement complexes et dégager plus d’une plus grosse parcelle ou aucune. Dans cet exemple, voici quelques-unes des permutations possibles :

  • Les trois propriétés adjacentes prises comme un « tout » pour la même expropriation—aucune plus grosse parcelle n’a été identifiée.
  • Deux propriétés adjacentes prises comme un « tout » pour la même expropriation, laissant une des propriétés adjacentes et le résidu non viable comme pouvant être combinés pour former une plus grosse parcelle.
  • Une propriété adjacente prise comme un « tout », laissant les deux autres propriétés adjacentes et le résidu non viable comme pouvant être combinés pour former deux plus grosses parcelles.
  • Seulement une partie de chaque propriété adjacente prise pour la même expropriation, les trois résidus pouvant être combinés avec le résidu non viable pour créer une plus grosse parcelle.
  • Seulement une partie de deux des propriétés adjacentes prises pour la même expropriation, deux des résidus pouvant être combinés avec le résidu non viable pour créer une plus grosse parcelle.
  • Seulement une partie de l’une des propriétés adjacentes prise pour la même expropriation, le résidu pouvant être combiné avec le résidu non viable pour créer une plus grosse parcelle.

Ces permutations ne sont aucunement exhaustives, surtout s’il y a plus d’un résidu non viable, mais la tâche d’identifier la plus grosse parcelle est une condition préalable dans l’évaluation des possibilités d’utilisation d’un résidu non viable et dans l’estimation de sa valeur contributive. La valeur contributive d’un résidu non viable sera influencée également par la taille de la plus grosse parcelle dans la mesure où le taux unitaire attribuable à la variable « taille » diminuera à mesure que la taille de la parcelle augmente et vice versa, tous les autres éléments de la valeur demeurant constants.

Utilisation optimale de concert avec une plus grosse parcelle

Aux É.-U., « les évaluateurs doivent garder en tête que la détermination de la plus grosse parcelle est requise dans toute tâche d’évaluation; peu importe si l’agence a désigné l’acquisition comme acquisition totale ou acquisition partielle. Il en est ainsi parce que, du point de vue pratique, qu’une acquisition soit totale ou partielle ne peut être établie tant que l’évaluateur n’a pas déterminé l’utilisation optimale et la plus grosse parcelle. »

Au Canada, les évaluateurs ne reçoivent pas l’instruction correspondante d’identifier la plus grosse parcelle tant des autorités fédérales que provinciales. La plupart des législations en matière d’expropriation font plutôt une référence indirecte à la plus grosse parcelle. Par exemple, dans ses Lignes directrices en matière d’évaluation de mars 2007, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada stipule, au paragraphe 2.12 en ce qui a trait à « une partie d’un droit ou une expropriation partielle », la valeur attribuée à cette partie de la sûreté doit être « proportionnelle à la valeur du bien-fonds exproprié par rapport à la valeur de la totalité du bien ». De plus, le paragraphe 26(3) précise que s’il n’y a pas de marché pour la partie prise « l’évaluation devrait correspondre au montant le plus élevé de la valeur qu’elle représente par rapport à l’ensemble de la propriété ou de la valeur d’un terrain équivalent », facteurs qui sont considérés dans la définition de la plus grosse parcelle.

Les exigences fondamentales établies par les tribunaux dans la définition de la plus grosse parcelle sont l’unité de propriété, l’unité de contigüité et l’unité d’utilisation (utilisation optimale). Les tribunaux ont statué que les unités de propriété, de contigüité et d’utilisation (utilisation optimale) doivent être présentes simultanément à la date de l’évaluation comme il serait probable quand on a affaire à un résidu non viable.

Certaines considérations clés de l’analyse de l’utilisation optimale comprennent :

  • Restrictions du titre : usage légal frappé de convention restrictive ou usage limité à un usage légal spécifique.
  • Permissibilité légale : l’usage doit être légal ou capable d’être légalisé (c.-à-d., rezonage et(ou) modification du plan original/directeur) dans un délai raisonnable.
  • Adaptabilité physique : le site et(ou) les améliorations, y compris l’infrastructure hors site, doivent être capables de supporter l’utilisation.
  • Effets externes : les répercussions sur l’utilisation de forces externes affectant les valeurs du bien-fonds.
  • Probabilité d’utilisation : doit avoir une probabilité de réalisation de plus de 50 %.
  • Délai d’utilisation : doit être réalisé dans un délai raisonnable.
  • Demande : il doit exister un marché actif pour l’utilisation.
  • Faisabilité financière : les prix et(ou) loyers doivent être suffisants pour supporter l’utilisation.
  • Durabilité : l’utilisation doit être productive au maximum à long terme.
  • Acheteur/utilisateur : l’acheteur ou utilisateur le plus probable doit être identifié.

Chaque expropriation a une incidence différente sur l’analyse de l’utilisation optimale. En cas de doute ou d’incertitude quant à la viabilité physique ou légale d’un résidu pour toute utilisation économique, on devrait demander l’avis indépendant d’une tierce partie qualifiée. Or, comme il est ultimement responsable de l’opinion sur l’utilisation optimale et de l’estimation de la valeur marchande correspondante, l’évaluateur doit être satisfait que les conclusions de toute autre tierce partie sont raisonnables et convenables avant de s’y fier.

Lorsque confronté à un résidu non viable, il peut être possible d’atténuer les dommages (effet préjudiciable). On peut parfois arriver à ce résultat en estimant la valeur contributive du résidu non viable à un bien-fonds adjacent en combinant les deux pour créer une plus grosse parcelle, comme dans le cas d’un assemblage impliquant divers droits de propriété. Dans ce cas, la plus grosse parcelle ne doit pas nécessairement avoir ou exiger l’unité de propriété.

Pour chaque plus grosse parcelle potentielle, l’utilisation optimale exige une analyse du bien-fonds attenant, avec et sans le résidu non viable, assortie d’une estimation de la valeur marchande du bien-fonds attenant (si ce dernier a sa propre utilisation optimale) et d’une estimation de la valeur marchande de la plus grosse parcelle. La différence entre les deux estimations de valeur marchande représente la valeur contributive maximale du résidu non viable à la valeur marchande de la plus grosse parcelle. Toute plus grosse parcelle qui incorpore un résidu non viable, ayant seulement un acheteur en perspective, est caractérisée comme en situation de marché bilatéral, ce qui peut avoir une forte incidence sur la valeur contributive du résidu non viable. Lorsque le potentiel de plus d’une plus grosse parcelle existe, la valeur contributive du résidu non viable est rehaussée par la présence de plus d’un acheteur en perspective.

Une plus grosse parcelle qui combine un bien-fonds non viable attenant (souvent par suite d’une expropriation partielle concernant la même expropriation) et un résidu non viable du bien-fonds en objet n’a besoin que d’une estimation de la valeur marchande de la plus grosse parcelle. Dans ce scenario, les deux propriétaires fonciers peuvent jouir d’un pouvoir de négociation égal. La pondération de la valeur marchande de la plus grosse parcelle, dans son utilisation optimale, sur la base d’un taux unitaire global, et l’application de ce taux unitaire à la superficie de terrain dans chaque bien-fonds peut constituer une méthode acceptable de détermination de la valeur contributive de chaque bien-fonds, pourvu qu’aucune amélioration ne soient apportée.

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La notion de plus grosse parcelle fait partie intégrante de l’analyse de l’utilisation optimale. Cette analyse doit refléter l’utilisation économique la plus probable et la plus financièrement faisable. Elle établit la base permettant l’estimation de la valeur marchande de la plus grosse parcelle et de la valeur contributive du résidu non viable. La valeur contributive maximum d’un résidu non viable réuni à une plus grosse parcelle, avant la prise en compte de la pertinence d’un rabais possible en situation de marché bilatéral, peut être estimée en soustrayant tous les frais prévus, y compris une allocation pour incitation à l’entrepreneuriat, associés à la consolidation du titre des deux bien-fonds et en obtenant l’utilisation optimale de la plus grosse elle.

En effet, la valeur contributive maximum d’un résidu non viable, par suite de tout ajustement pour transaction dans un marché bilatéral, comme partie d’une plus grosse parcelle représente la valeur après expropriation du résidu à inclure dans le test avant et après expropriation appliqué dans l’évaluation d’une expropriation partielle. Dépendamment de la relation entre la plus grosse parcelle et le résidu non viable, il est possible d’avoir une utilisation optimale de la plus grosse parcelle qui diffère de l’utilisation optimale du bien-fonds attenant.

Un exemple hypothétique du test avant et après impliquant deux domaines résiduels non viables, y compris la présence d’un marché bilatéral, est illustré au diagramme 1 et résumé comme suit :

Test avant et après, deux domaines résiduels non viables

Valeur avant la prise (parcelle plus grande) ignorant le projet – 2,00 acres 180 000 $

Moins : valeur contributive de la partie prise (comme partie de l’ensemble) 0,77 acres 69 300 $

Valeur résiduelle avant la prise (comme partie de l’ensemble @ 90 000 $ l’acre) 1,23 acres 110 700 $

Moins :

– Valeur contributive Résidu A (1,08 acre) comme partie de la parcelle plus grande (2,163 acre) 90 000 $

– Valeur contributive Résidu B après rabais de 50 % pour le marché bilatéral (7 500 $ x 0,5) 3 750 $

– Sous-total 93 750 $

Égale : Effet préjudiciable (Amélioration) 16 950 $

Tant que le propriétaire d’un bien-fonds adjacent peut bénéficier financièrement de l’acquisition d’un résidu non viable, on suppose que le propriétaire du bien-fonds adjacent est un « acheteur sérieux ». Pour réaliser un bénéfice financier, le propriétaire d’un bien-fonds adjacent paiera normalement une somme inférieure à la valeur contributive maximum pour un résidu non viable.

Le rabais associé au transfert d’un résidu non viable dans un marché bilatéral dépend largement de la mesure dans laquelle le résidu non viable augmente la valeur du bien-fonds adjacent. Lorsqu’un résidu non viable n’augmente que marginalement l’utilité du bien-fonds adjacent, la valeur contributive peut être virtuellement non existante relativement à la valeur contributive maximum à la plus grosse parcelle. Inversement, si l’ajout d’un résidu non viable change l’utilisation optimale d’un bien-fonds adjacent de résidentielle à commerciale comme partie de la plus grosse parcelle, il est probable qu’aucun rabais proportionnel à la valeur contributive maximum ne serait justifié.

Le texte suivant, extrait d’un rapport de septembre 2000 de la ville d’Ottawa, décrit une parcelle non viable (analogue à un résidu non viable lors d’une expropriation antérieure) et sa façon d’en disposer. Apparemment, la valeur contributive de la parcelle non viable était fondée sur une évaluation, mais aucune indication n’est fournie quant à la méthode utilisée par l’évaluateur pour en arriver à sa conclusion sur la valeur et à savoir si un rabais a été associé au transfert d’une parcelle non viable en condition de marché bilatéral.

En 1998, la Région a acheté le bien-fonds…en vue de la reconstruction du chemin Hawthorne ….L’entente convenue [au prix de 226 550 $] comprenait les terrains et bâtiments et prévoyait une indemnisation pour les transferts de droits en vertu de la Loi sur l’expropriation. Les bâtiments furent démolis, les travaux routiers furent effectués et un arpentage officiel a été entrepris afin de définir tout terrain excédentaire [résidu]….

Le terrain excédentaire est un site rectangulaire de 3 295 m2 [35 467 pi2]…donnant sur le chemin Hawthorne entre le chemin Stevenage et le chemin Hunt Club dans les villes de Gloucester et Ottawa. Ce bien-fonds est zoné M4(1.0) et I-Hf(1.0) – Industriel. La parcelle ne satisfait pas aux exigences minimales pour la zone et ne peut pas être aménagée. Elle est donc considérée comme parcelle non viable d’utilité seulement pour le propriétaire attenant.

Les propriétaires adjacents…ont communiqué avec la Région et un prix d’achat de 80 000 $ a été négocié.

Dans certaines juridictions, la politique relative à la disposition d’une parcelle restante se rattache spécifiquement aux améliorations apportées à l’utilisation optimale d’un bien-fonds adjacent : « L’autorité gouvernante d’un compté est autorisée à vendre et transférer des parcelles de petites ou étroites bandes de terre, de forme ou de taille telle qu’elles ne peuvent être utilisées indépendamment en conformité du zonage, d’autres ordonnances de subdivision ou de développement applicables ou de plans d’aménagement des sols, ou comme rues, soit possédées en fief ou utilisées en servitude, aux propriétaires fonciers attenants lorsque ces ventes et transferts facilitent la jouissance de l’utilisation optimale du bien-fonds du propriétaire attenant. » Cette politique consistant à maximiser la valeur de la parcelle restante lors de sa disposition appuie l’objectif de réduire l’effet préjudiciable dans le traitement d’un résidu non viable.

Alors que l’objectif ultime est d’atténuer les dommages, de réduire l’effet préjudiciable subi par un résidu non viable, le processus par lequel cet objectif est atteint consiste à améliorer la valeur marchande d’un bien-fonds adjacent, quand on considère ce dernier comme partie d’une plus grosse parcelle. Quand on estime la valeur contributive d’un résidu non viable à un bien-fonds adjacent, la valeur de la contribution se fonde sur l’utilisation optimale de la plus grosse parcelle, comme le suggère le ministère des Transports de l’Ontario : « Si on conclut que le résidu n’est pas viable, on doit examiner et analyser l’incidence qu’aurait l’ajout des terres du Ministère à chaque bien-fonds attenant. La valeur du résidu sera la valeur de sa contribution au bien-fonds comme partie d’une plus grosse parcelle. L’objectif de l’évaluation consistera à estimer l’augmentation de la valeur marchande du bien-fonds du propriétaire adjacent si ce dernier faisait l’acquisition des terres du Ministère. » Tout avantage financier résultant d’une réduction de l’effet préjudiciable peut être appliqué seulement au résidu.

Dérogation aux paramètres reconnus en matière d’évaluation

Moller a traité une expropriation de trois bandes de terre non viables de 1,94 acre, 0,79 acre et 0,37 acre de terrains zonés agricole (AG), aux fins d’élargir une route attenante. Toutes les parties ont convenu qu’aucune de ces petites parcelles non viables était vendable indépendamment. Cependant, un évaluateur a préparé un « Rapport d’évaluation d’une parcelle de terre hypothétique de 3 acres pour résidence rurale à la demande du client ». L’évaluateur a affirmé croire que son rapport « observait des pratiques d’évaluation généralement reconnues ». La Commission a cité directement du rapport de l’évaluateur : « Le terrain est à l’intersection des routes 2, 59 et 674, un mille au nord de la ville de Sexmith dans le comté de Grande Prairie no1, Alberta. Ce bien-fonds jouit essentiellement de bonnes caractéristiques esthétiques en vue d’un futur développement rural. Le bien-fonds est zoné résidentiel rural. Le bien-fonds aura un bon accès routier et de bonnes caractéristiques esthétiques globales. On reconnaît que chaque parcelle possède des attributs spécifiques qui en affectent la valeur, mais le présent rapport a pour but d’établir une généralisation aux fins d’une indemnisation spécifique. Le présent rapport n’est pas adapté à la loi sur l’expropriation mais plutôt au mandat du client et applique des pratiques d’évaluation généralement reconnues. »

L’évaluateur a concédé que : « Mon évaluation n’a rien à voir avec les trois petites parcelles ou avec leur taille ou forme. On m’a demandé d’évaluer un terrain de trois acres – ce que j’ai fait, mais je ne l’ai pas évalué comme une étroite bande n’ayant qu’une seule utilité, je l’ai évalué comme un site de trois acres qui pouvait être vendu. »

En rejetant les données de l’évaluateur, la Commission a cité les raisons suivantes :

  • L’absence reconnue de relation à la Loi sur l’expropriation tel qu’indiqué dans la citation tirée de ce rapport.
  • Plusieurs des hypothèses, notamment celle du zonage de la propriété, ne sont pas démontrées.
  • Le fait non considéré que la propriété en objet est et a toujours été en production agricole.
  • L’absence de similarité entre les comparables et le terrain en objet….
  • L’admission que l’évaluation ne portait pas sur un terrain de la forme ou de la taille du terrain en objet.
  • L’admission que son hypothèse de départ suppose que le terrain est vendable, ce qui n’est pas le cas du terrain en objet.

Les trois bandes linéaires non viables n’avaient aucune utilisation optimale indépendante. Elles auraient dû être évaluées comme partie d’une plus grosse parcelle dans son utilisation optimale, d’une manière reflétant un résidu non viable, mais sans possibilité de rabais et en conformité de la loi sur l’expropriation pertinente. Pour témoigner comme expert indépendant, un évaluateur doit aider le juge des faits en lui donnant des opinions de la valeur objectives, pertinentes et fondées.

La valeur marchande d’un résidu juxtaposée à la valeur avant expropriation révèle la mesure la plus claire et la plus exacte de l’effet préjudiciable (dommages) et de l’amélioration (hausse de la valeur) occasionnée par une expropriation partielle. Pourvu que des dispositions soient prises pour tenir compte de la valeur contributive de la partie expropriée, le propriétaire foncier est toujours assuré de recevoir au moins la valeur marchande du terrain exproprié.

Conclusion

La valeur d’un résidu, viable ou non, est toujours établie comme exercice indépendant de l’évaluation avant expropriation. Cela signifie que tout résidu est traité comme bien-fonds nouvellement créé et que toutes les enquêtes et analyses que comporte le processus d’évaluation doivent être entreprises de nouveau et être en conformité de la loi sur l’expropriation pertinente. Par conséquent, pour le traitement d’un résidu, l’évaluateur devrait :

  • Identifier la(les) plus grosse(s) parcelle(s) dans le contexte du résidu, tout en effectuant simultanément une analyse de l’utilisation optimale.
  • Identifier les droits du bien-fonds à évaluer.
  • Identifier les caractéristiques pertinentes ayant une influence sur la valeur du bien-fonds.
  • Identifier l’(les)acheteur(s) le(s) plus probable(s) du résidu.
  • Identifier la(les) méthode(s) d’évaluation appropriée(s).
  • S’assurer du type de données du marché à collecter.
  • Dériver une estimation de la valeur (c.-à-d., la valeur marchande ou la valeur contributive).

Quand un résidu montre des signes d’amélioration sous forme d’avantages spéciaux qui lui sont propres (c.-à-d. que ces avantages ne retombent pas sur l’ensemble de la collectivité), tout effet préjudiciable occasionné par l’expropriation peut être réduit du montant de l’amélioration attribué aux avantages spéciaux. Le montant de toute amélioration peut être déduit seulement de tout effet préjudiciable subi par un résidu. L’amélioration ne peut être appliquée pour réduire le droit accordé par la loi à un propriétaire foncier de toujours recevoir au moins la valeur marchande du terrain exproprié.

Une expropriation partielle qui résulte en deux résidus, un dont la valeur est rehaussée de façon disproportionnée et l’autre dont la valeur est abaissée de façon disproportionnée, tous deux par rapport à leur valeur avant expropriation, l’effet net de comparer la valeur de l’un des résidus à la valeur de l’autre peut soulever la possibilité, soit d’un effet préjudiciable sur l’un (dommages), soit d’une amélioration sur l’autre.

Une évaluation d’expropriation partielle préparée en conformité des dispositions de la loi sur l’expropriation afférente et en conformité des normes reconnues en matière d’évaluation, comprenant des opinions quant à la valeur correctement étayées et présentées de façon impartiale, claire et convaincante aidera le juge des faits à déterminer le montant de l’indemnisation à laquelle a droit un propriétaire foncier visé.

Notes

. Contrairement aux É.-U., où le Cinquième amendement à la Constitution prévoit que : « on ne peut utiliser la propriété privée à des fins publiques sans indemnisation équitable », au Canada, aucun propriétaire d’un terrain exproprié par statut à des fins publiques a droit à une indemnisation. Par conséquent, au Canada, le gouvernement fédéral et chaque province et territoire a adopté diverses lois régissant l’expropriation qui définissent les éléments d’indemnisation en s’appuyant sur l’hypothèse qu’il y aura indemnisation pour expropriation à moins d’interdiction expresse.

2. Dans Gardiner Burton Agencies Ltd. c. Nova Scotia Power Corp. (1986) NSCA, la décision de la cour fait ressortir que la valeur « après expropriation » doit être estimée indépendamment, le résultat étant déduit de la valeur « avant expropriation » pour déterminer le montant de l’indemnisation causée par l’effet préjudiciable.

3. Le projet représente l’utilisation publique prévue sur laquelle repose la nécessité ou la justification d’une expropriation. En évaluant le bien-fonds avant l’expropriation, on n’ignore pas l’influence du projet. Après l’expropriation, la valeur du résidu prend en compte l’influence du projet et tout avantage spécial en découlant. Voir Windsor (ville) c. Paciorka Leaseholds Limited, 2012 ONCA 431 (CanLII). Autorisation d’appel rejetée par la Cour suprême du Canada.

4. Appraisal Institute, The Dictionary of Real Estate Appraisal, 5e édition (Appraisal Institute, 2010, p. 166).

5. Appraisal Institute, The Dictionary of Real Estate Appraisal, 5e édition (Appraisal Institute, 2010, p. 167).

6. Appraisal Institute, The Appraisal of Real Estate, 13e édition (Appraisal Institute, 2008, p. 15).

7. « Les évaluations réalisées à des fins d’expropriation peuvent comprendre des conditions hypothétiques et peuvent exiger que l’évaluateur invoque une exception juridictionnelle. [v. 3.6] » NUPPEC, en vigueur le 1er janvier 2012, Norme relative aux activités d’évaluation 7.12.4.

8. Appraisal Institute, The Dictionary of Real Estate Appraisal, 5e édition (Appraisal Institute, 2010, 122).

9. Creative Stretch Fabrics Ltd. v. Pitt Meadows (District) (1994), 54 L.C.R. 128, (B.C.E.C.B.).

10. Aussi appliquée dans McIlwaine c. Saskatchewan, 2000 SKQB 326 (CanLII); Holdom c. British Columbia Transit (2005), 85 L.C.R. 198, 32 R.P.R. (4e) 58 au para. 93 (B.C.E.C.B.); Lulu Island Holdings Ltd. c. GVSDD, 2007 BCSC 938 (CanLII).

11. Selon Eaton, aux É.-U., « il est clairement établi, du moins dans le contexte d’une poursuite pour indemnisation équitable en vertu du Cinquième amendement, que les préjudices aux affaires d’un propriétaire foncier ne sont pas indemnisables. » Real Estate Valuation in Litigation, 2e édition (Appraisal Institute, 2005, 58).

12. Cette mesure, connue sous le nom d’Edwards Rule, provient d’une décision de la Cour d’appel anglaise dans l’affaire Edwards c. Minister of Transportation (1964) 2 Q.B. 135. Les juridictions au Canada ne suivent pas toutes la Edwards Rule. Par exemple, la loi sur l’expropriation de l’Alberta n’est pas aussi restrictive que la Edwards Rule et prévoit une indemnisation pour effet préjudiciable si elle résulte de l’expropriation ou de la construction ou de l’utilisation « des travaux pour lesquels le terrain a été acquis ». Voir Landex Investments Ltd. c. Red Deer (ville), 1991 ABCA 199 (CanLII).

13. Todd, « The Law of Expropriation and Compensation in Canada », 2e édition, 1992, Carswell Thomson Professional Publishing, p.335.

14. Les réclamations pour dommages personnels ou d’affaires devraient être abordées séparément et non comme partie de la valeur du bien réel.

15. Ammouri c. Ministry of Transportation, 2008, Décision OMB LC060014. Dans Vaness c. Kamloops (ville), 2002 BCSC 663 (CanLII), tout en reconnaissant que la différence entre les évaluations avant (sans la digue) et après (avec la digue) est une façon convenable de mesurer les dommages, la cour a rejeté la preuve avancée par l’évaluateur qui consistait en une analyse des lots riverains indépendants à l’échelle de la province comme justification d’une dépréciation de 30 % de la valeur. La cour a accordé une somme nominale de 1 000 $. L’évaluateur a aussi été réprimandé pour avoir outrepassé son domaine de compétence en déclarant la fonction dans son rapport d’évaluation d’évaluer la réclamation des dommages », rôle qui est réservé à la cour.

16. Kirk Corson, « Rural Settings: Valuation of Partial Acquisitions and Damages », Right of Way (mai-juin 2008, 18-22).

17. Dans une étude de 1994 « Determination and Evaluation of Remainder Characteristics Which Significantly Affect Right-of-Way Costs », préparée par le Texas Transportation Institute, une enquête auprès de divers groupes, y compris des évaluateurs et professionnels gouvernementaux des droits de passage, a classé par ordre d’importance l’impact des dommages aux résidus comme suit : 1) changement de l’utilisation optimale; 2) taille du résidu; 3) emplacement de l’accès à la route attenante; 4) capacités de développement; 5) taille du résidu; 6) largeur du résidu sur la route attenante; 7) hauteur de la route attenante; 8) longueur du résidu (profondeur)/nombre d’accès à la route. http://d2dtl5nnlpfr0r.cloudfront.net/tti.tamu.edu/documents/1390-1.pdf.

18. Carol Lansing et Mark Savin. « Assessing and Mitigating the Zoning Impacts of a Partial Taking » Condemnation, Zoning and Land Use, 2009 Annual Review, American Bar Association. http://www.faegrebd.com/webfiles/lansing_reprint.pdf.

19. Aux É.-U., un résidu non rentable ne peut généralement être pris en compte au-delà des limites du résidu comme moyen d’atténuer les dommages. Cependant, dans Gilbert c. The State of New York, #2009-013-502, réclamation no 107457, le juge a conclu : « Je constate que l’utilisation optimale du bien-fonds en objet après l’expropriation était à vendre aux propriétaires adjacents, notant que cette utilisation optimale pourrait inclure une multitude d’usages cohérents avec le zonage au moment de l’expropriation qui …permet[tait] le développement commercial et résidentiel… »

20. Le coût de redressement peut aussi s’appliquer quand un résidu viable subit une diminution de valeur, dont la perte peut être atténuée complètement ou partiellement à un coût qui est inférieur à la diminution de valeur correspondante sans encourir de dépenses pour entreprendre le redressement. Voir Gene Reilly, Wu Sun, Louis J. Pignataro et Nicholas J. Monahan, Jr., « Partial Acquisitions of Right of Way in New Jersey », The Appraisal Journal (Appraisal Institute, janvier 2000), 64-71, pour une analyse du coût de redressement lors d’expropriations partielles pour divers types de biens-fonds. Une copie de cette étude peut être téléchargée du site http://ntl.bts.gov/lib/21000/21400/21467/PB99119513.pdf.

21. On peut s’attendre à ce qu’un résidu ne soit pas enclavé à perpétuité. Par exemple, un résidu enclavé dans un espace vert en bordure d’une zone urbanisée peut faire partie dans un avenir rapproché d’un projet d’aménagement en conjonction avec des terrains adjacents dans le cadre d’un plan complet d’aménagement « en bloc ». Dans Clarke c.Ville d’Ottawa, décision 1144 de la Commission des affaires municipales de l’Ontario rendue le 18 juillet 2001, la Commission a refusé de réduire la valeur d’un résidu enclavé (parcelle A), jugeant que « les municipalités exigeraient probablement que les propriétaires de parcelles de la taille et de la forme de la parcelle A (10 acres) et les … terrains [adjacents]…[23.5 acres] fassent partie d’un plan de lotissement complet. »

22. Michael Wolff, « Value Vs. Size in The Real Estate Market », Right of Way (juillet-août 2007), 36-31, application d’une analyse par régression linéaire. http://www.irwaonline.org/eweb/upload/0707-5.pdf.

23. Appraisal Institute, « Uniform Appraisal Standards for Federal Land Acquisitions » (Appraisal Institute, 2000, 18).

24. Voir Caldwell & Ross Limited v. New Brunswick (Transportation), 2009 NBQB 329 (CanLII) pour une discussion sur la plus grosse parcelle et comment la valeur marchande est affectée par la « taille » de la parcelle. http://www.canlii.org/en/nb/nbqb/doc/2009/2009nbqb329/2009nbqb329.pdf.

25. Copie disponible au http://www.tpsgc-pwgsc.gc.ca/biens-property/documents/pubs-re39-eng.pdf.

26. Tony Sevelka, « Expropriation and Condemnation: The Largest Parcel », The Appraisal Journal (janvier 2003, 75-93).

27. Dans Debra L. Miller, in her Capacity as the Secretary of Transportation for the State of Kansas, c. Lawrence Preisser and Tracy Chambers, 2012, la cour d’appel a conclu que « la cour de district a fait erreur parce que l’unité de propriété n’est pas requise quand un propriétaire foncier présente l’assemblage de deux parcelles de terre seulement aux fins d’établir l’utilisation optimale du bien-fonds; il suffit plutôt d’établir qu’il y a une probabilité raisonnable de fusion des propriétés …[et la cour de district] a interdit aux propriétaires fonciers de présenter des preuves concernant l’évaluation fondée sur l’utilisation de leur bien-fonds comme unité économique intégrée [plus grosse parcelle] à un bien-fonds adjacent… »

28. Burmont Holdings Ltd. c. Chilliwack (District), 1994 CanLII 3326 (BC SC). La restriction d’utilisation a des effets négatifs sur la valeur marchande.

29. Farlinger Developments Ltd. c. Borough of East York [1975] Ont. C.A. En considérant la possibilité de procéder à un rezonage, la cour d’appel a statué que « l’utilisation optimale doit se fonder sur quelque chose de plus concret qu’une possibilité de rezonage. Il doit y avoir une probabilité ou une attente raisonnable que le rezonage aura lieu….

La probabilité indique une possibilité supérieure à 50 %. » Cette constatation reposait sur l’obtention, dans un délai d’un an, du rezonage d’un terrain à utilisation unifamiliale à un terrain à haute densité résidentielle, reconnaissant qu’une utilisation raisonnablement probable est sensible au temps (c.-à-d., pas éloignée). Une utilisation envisagée qui n’a pas une probabilité supérieure à 50 % de satisfaire à toutes les exigences fondamentales de l’analyse de l’utilisation optimale est écartée des possibilités et ne peut former la base d’une opinion sur la valeur marchande. Sperduti, Frank J. « Proving Market Value: Legal Issues For Appraisers » http://www.franksperduti.com/wordpress/wp-content/uploads/2012/09/Proving-Market-Value.pdf.

30. Guido c. Ontario Ministry of Transportation (1977) Ont. H.C.J. La cour divisionnaire a maintenu le rejet par la Commission qu’un motel constituait l’utilisation optimale parmi les usages légalement autorisés, parce que l’utilisation comme motel était considérée physiquement impossible, financièrement imprudente et sans demande touristique suffisante. Les deux parties ont convenu qu’aucun des autres usages permis (hôtel, cabines de touriste, taverne, débit de boisson et de restauration ou garage) ne convenait au terrain. La Commission a considéré que la vraisemblance d’un accès commercial de la route était « tellement improbable qu’on pouvait la qualifier de non existante » et que, à cause de la forme en M de la parcelle, les effets de l’exigence de retrait étaient « tellement rigoureuses qu’elles rendaient [la partie aménageable de la parcelle] pratiquement inutile…comme site d’aménagement d’un motel. »…Aussi…le prolongement du Queensway vers l’ouest était responsable « d’une baisse dans la circulation de véhicules passant et d’un changement dans sa composition de migrants quotidiens et de touristes à une majorité de migrants quotidiens, » et qu’il était « excessivement difficile de croire qu’un acheteur intéressé et prudent risquerait un investissement dans le…terrain et la construction d’un motel. »

31. L’aménagement à proximité d’un aéroport ou d’un crématorium aurait probablement une incidence négative pouvant empêcher un développement « résidentiel » même si cette utilisation est légalement permissible.

32. Voir la note en bas de page 29.

33. Les terres rurales et agricoles en bordure d’une zone urbaine peuvent ne pas avoir un délai assuré pour parvenir à leur utilisation optimale, mais l’attente de l’urbanisation comme utilisation optimale devrait être reflétée dans les prix de ventes de terrains comparables à des emplacements semblables. Un terrain non urbain ou agricole à potentiel de développement urbain à long terme reconnu par le marché peut être caractérisé comme propriété foncière spéculant sur un développement urbain anticipé poursuivant son utilisation courante dans un avenir prévisible. Dans Higgins and Tuddenham c. Province of N.B., 2005 NBQB 237, la cour a reconnu que « bien qu’un développement résidentiel soit possible le long de la route,…il y avait peu, sinon aucune, demande en ce sens au moment de cette expropriation….et les conclusions de l’évaluateur quant à l’utilisation optimale du bien-fonds ont été acceptées, c.-à-d., la poursuite de l’utilisation de la parcelle mère comme terrain boisé. »

34. Une utilisation économique qui échoue aux tests initiaux de possibilité physique et de permissibilité légale à un niveau de probabilité supérieur à 50 % est écartée de toute considération ultérieure dans l’analyse de l’utilisation optimale.

35. Dans Thoreson c. Alberta (Ministry of Environment), 2012 ABCA 170 (CanLII), la cour d’appel a statué que les preuves avancées par le propriétaire foncier étaient sans fondement et de peu d’utilité : « Bien qu’ils aient reconnu que le développement des terrains en objet dépendait de l’évaluation des coûts et de la demande, les …experts ont omis de le faire. Ceci…constitue une faille fatale dans leur analyse et donne peu de poids aux preuves qu’ils avancent. Plus précisément, la suggestion que, sans le [projet] RDA/TUC, les terres en objet auraient été pleinement développées et pourvues des services publics dès le 31 mars 2004 est rejetée. Par conséquent, l’évaluation du plaignant de 400 000 $ l’acre des terrains expropriés qui supposent le plein raccordement des services publics et le plein développement à la date en vigueur est de peu d’utilité dans l’établissement ultime de la valeur. » Le tribunal inférieur a aussi cité les nombreuses étapes nécessaires dans le processus de développement qui ont été laissés de côté dans le processus consistant à élever un terrain vague au niveau de terrain desservi et entièrement aménagé pour lotissements industriels. La cour a fixé la valeur marchande des terrains à 84 500 $ et 87 000 $ l’acre.

36. Une recherche du titre est requise pour chaque bien-fonds attenant qui pourrait faire partie de la plus grosse parcelle, de concert avec un résidu non viable, afin de dégager toutes contraintes légales (restrictions d’utilisation) et contraintes physiques (servitudes enregistrées) relatives à l’analyse de l’utilisation optimale.

37. Les expressions bien-fonds non viable et parcelle non viable sont utilisées de façon interchangeable et ont été définies de diverses façons comme « une parcelle de terre qui, en elle-même, ne serait pas admissible à un permis de construction » (ville de Milton) et « une parcelle de terre qui est enclavée » (Infrastructure Ontario). Le ministère des Transports de l’Ontario définit les parcelles non viables comme « des parcelles qui ne sont pas capables de supporter un développement indépendant. Elles peuvent avoir une forme irrégulière, avoir un accès limité ou non existant, ou avoir des lacunes qui en empêchent une utilisation ou un développement indépendant », Lignes directrices sur l’évaluation foncière (février 2008, 26).

38. Gordon E. MacNair, « Value in Contribution & Landlocking », Right of Way (janvier-février 12-17), décrit un certain nombre de transactions réelles de résidus à divers taux de rabais dans un marché bilatéral.

39. Cobb County, Georgie.

40. Ministère des Transports de l’Ontario, Lignes directrices sur l’évaluation foncière (décembre 2008, 26).

41. Moller c. Canada (Transports), 2008 CanLII 88538 (AB LCB). Voir Alberta (Transport, Minister) c. Bonaventure Sales Ltd., 1980 ABCA 142 (CanLII), dans laquelle la cour d’appel a ordonné l’application de la notion de la plus grosse parcelle pour évaluer des bandes de terre expropriées auxquelles la Commission avait attribué des valeurs inappropriées comme aménagements en acres vendables indépendamment. http://www.canlii.org/en/ab/abca/doc/1980/1980abca142/1980abca142.pdf

42. Dans Falkirk Enterprises Ltd. c. Calgary (ville), 2012, CanLII 60869 (AB LCB), la Commission a reconnu l’un des évaluateurs comme présentant des preuves « de façon claire et professionnelle » tout en faisant allusion à l’autre évaluateur comme une personne « dont l’expérience est surtout comme témoin professionnel ».

43. Les dommages (effet préjudiciable) calculés arbitrairement comme un pourcentage de la valeur avant expropriation ou la valeur résiduelle après l’estimation de la valeur contributive de la partie expropriée comme partie de la plus grosse parcelle néglige de prendre en considération le résidu à sa juste valeur et dissimule l’ampleur des dommages réclamés sans égard à la valeur du résidu.

44. Dans F & F Realty Holdings Inc. c. Ontario (Ministère des Transports), 1998 Carswell Ont 3046, 64 L.C.R. 52, la Commission a jugé que la voie de sortie construite en rapport avec la partie du terrain exproprié avait à la fois des effets positifs (avantage spécial) et négatifs (effet préjudiciable) sur le résidu de 15,2 acres, l’amélioration attribuée

aux 13,2 acres dépassant l’effet préjudiciable assigné à deux acres, restreignant ainsi l’indemnisation à la valeur marchande du terrain exproprié (4,3 acres).

45. Dans Kodila c. British Columbia (Ministry of Transportation), 2007, BCSC, alors que la « méthode avant et après » indiquait que la diminution de la valeur occasionnée par l’expropriation partielle était de 2 074 $, la cour a adjugé 7 818 $ au propriétaire foncier comme valeur contributive du terrain exproprié comme partie de la plus grosse parcelle.

46. Le fardeau de la preuve d’amélioration repose entièrement sur l’autorité expropriante. Lafleche c. Ministère des Transports et des Communications (1975), 8 L.C.R. 77 at 86 (Ont. Div. Ct.); et Thunderbird Entertainment Ltd. c. Greater Vancouver Transportation Authority, 2012 BCCA 294 (CanLII).

47. Toutes les provinces, sauf la Colombie-Britannique, et le gouvernement fédéral restreignent l’application des avantages spéciaux aux effets préjudiciables. La Colombie-Britannique permet la soustraction des avantages spéciaux de la réclamation totale d’indemnisation.

48. Voir la note en bas de page 47.

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